Emballages et vaisselle plastique à usage unique : comment s’en débarrasser ?
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Emballages et vaisselle plastique à usage unique : comment s’en débarrasser ?

Toujours très présents mais bientôt partiellement interdits, les emballages et la vaisselle plastique à usage unique sont plus difficiles qu’il n’y paraît à éradiquer. Attention aux fausses bonnes idées !

 

1/ Les enjeux


D’où viennent ces déchets ?

Les emballages plastique utilisés pour les repas viennent en grande majorité de la vente à emporter et de la livraison à domicile. Or les enseignes de restauration rapide et les plateformes de livraison multiplient les emballages inutiles : 13 milliards d’unités d’emballages issus de la restauration rapide en 2012 selon l’ADEME[1], un chiffre certainement plus élevé encore en 2019…

Que prévoit la réglementation ?


Le législateur veut agir d’abord sur les emballages à usage unique en matière plastique :

  • A partir du 1er janvier 2020 en France, seront interdits les cotons-tiges et la vaisselle jetable en plastique (gobelets, verres et assiettes) ;
  • A partir du 1er janvier 2021 en Europe, d’autres produits en plastique à usage unique seront interdits à leur tour : les pailles, bâtonnets mélangeurs, couverts, tiges de ballons et contenants alimentaires en polystyrène expansé.

 

2/ Les alternatives jetables au plastique à usage unique


Le carton : souvent une bonne idée


Du point de vue de leur fin de vie, certains produits sont plus faciles à remplacer que d’autres… C’est le cas par exemple des sacs plastique, remplaçables facilement par des sacs en kraft, qui ont le double avantage :

  • D’être biodégradables : au cas où vous auriez un compost chez vous ou que – par mégarde – vous jetteriez vos déchets dans la nature ;
  • D’être recyclables : au cas où vous feriez le tri chez vous.

Même principe pour la paille : si vous tenez absolument à en utiliser une, alors la paille en carton a l’avantage d’être facile à recycler.

 

Le bioplastique : souvent une fausse bonne idée


Un produit « biosourcé » est obtenu à partir de la biomasse, c’est-à-dire une matière première naturelle et renouvelable. Pour les emballages ou la vaisselle, cette matière première est par exemple l’amidon de maïs, la fécule de pomme de terre, la fibre de cellulose ou encore le bambou.

Le « bioplastique » est tout simplement un plastique biosourcé : c’est donc un plastique qui reproduit avec des polymères naturels les caractéristiques des polymères de synthèse (pétrosourcés). Depuis quelques années, les initiatives sont nombreuses pour développer des bioplastiques, toutes plus créatives les unes que les autres – et pour n’en citer que deux :

  • Bioplastique à base d’algues : l’entreprise bretonne Algopack, créée en 2012, fabrique du bioplastique à partir de déchets industriels d’algues. L’entreprise met en avant le fait que cette nouvelle matière à base d’algues se décompose en 12 semaines sur terre et 4 heures en mer, sachant que son prix est quasiment identique à celui du plastique ;
  • Bioplastique à base de peaux de banane : l’entrepreneur indien Jayesh Vir a mis au point un système qui transforme la fibre du fruit en tissus, lesquels sont recyclables jusqu’à 10 fois. L’entrepreneur est également parvenu à transformer d’autres déchets agricoles, issus de cannes à sucre et de feuilles de palmier, en vaisselle jetable (gobelets, assiettes, couverts).


A priori
séduisant, le bioplastique se heurte pourtant à plusieurs limites majeures :

  1. Il est 30 à 50 % plus cher qu’un plastique fossile ;
  2. Il n’est pas nécessairement biodégradable ! Parce qu’il a les mêmes propriétés qu’un plastique fossile, un plastique biosourcé peut très bien ne pas être biodégradable ;
  3. Quand il est biodégradable, il n’est pas nécessairement biodégradé : encore faut-il qu’un plastique biosourcé soit jeté avec les biodéchets pour être, in fine, biodégradé[2]. Par conséquent, en l’absence de collecte séparée des biodéchets, un bioplastique est jeté avec les déchets résiduels, donc au mieux incinéré et non recyclé !
  4. Enfin… le bioplastique reste souvent à usage unique. Ainsi, le bioplastique :
    • D’une part n’échappe pas à la Directive européenne sur les plastiques à usage unique ;
    • D’autre part n’est pas meilleur, du point de vue de l’usage, que son alter ego fossile.

En conclusion, le bioplastique n’est pas LA solution pour remplacer la vaisselle et les emballages plastique du déjeuner : il est même souvent une mauvaise idée !


3/ Les vraies solutions : celles qui repensent l’usage


La vaisselle ou le récipient à laver soi-même


Pour remplacer les produits en plastique à usage unique, l’utilisation de couverts en métal ou de récipients en verre ou en plastique rigide est finalement recommandée :

  • Couverts en métal : aujourd’hui certaines plateformes de livraison en proposent (comme Frichti), ou mieux encore n’en proposent pas (comme FoodChéri), faisant le pari que leurs clients en possèdent déjà et que ceux qui en veulent en plus doivent payer pour les avoir ;
  • Récipients en verre ou en plastique rigide : les tupperwares et les récipients en verre (de marque Glasslock ou Pyrex par exemple) restent une solution très simple pour emporter son déjeuner au travail… ou ailleurs ! A noter que d’un point de vue environnemental, les récipients en plastique rigide sont même souvent meilleurs sur l’ensemble de leur cycle de vie que les récipients en verre, qui sont plus consommateurs d’énergie et de ressources en phase de fabrication.


Le retour de la consigne


Si la propriété vous effraie, plutôt que d’acheter votre propre récipient réutilisable, vous pouvez le louer… pour un prix symbolique qui est celui de la consigne ! Plusieurs start-ups essaient aujourd’hui de remettre la consigne au goût du jour et d’appliquer ce système aux emballages du déjeuner :

  • GreenGo, créée en 2018, propose un nouveau service de consigne digitalisé qui permet de réduire les déchets du déjeuner. GreenGo met à disposition de ses clients des récipients consignés, prêts à recevoir les aliments que l’on souhaite, au rayon traiteur d’une grande chaîne de produits biologiques. Le client consomme son plat, puis récupère un avoir valable dans le magasin, s’il rapporte son contenant vide après utilisation ;
  • De la même manière, la start-up Reconcil (pour « Réseau d’emballages consignés citoyen et local ») a créé un système d’emballages consignés dont le principe est simple : avec son repas, le client achète avec une boîte en polypropylène, un plastique réutilisable environ 50 fois, au prix de 2 ou 3 euros. Une fois son repas consommé, il peut rapporter cette boîte quand il le souhaite dans l’un des restaurants faisant partie du réseau Reconcil et récupérer les 2 ou 3 euros qu’il avait payés ;
  • Dernier exemple en France : Pyxo, start-up créée en 2018 également, contractualise avec les entreprises et met à disposition de leurs salariés des boîtes à lunch utilisables dans les restaurants partenaires aux alentours. Une fois le plat terminé, il suffit de déposer la boîte vide dans un corner prévu à cet effet, situé dans les locaux de l’entreprise ;
  • En Suisse, ce système fonctionne déjà : l’entreprise Recircle propose aux établissements des boîtes à repas réutilisables, consignées au prix tout à fait modeste de 8€50 ! Et les clients sont… emballés : en deux ans, 70 000 boîtes ont été distribuées à plus de 400 restaurants partenaires. De plus, les collectivités locales soutiennent cette mesure et réfléchissent à taxer les emballages à usage unique pour lancer un changement de conscience collectif.


D’autres façons de repenser l’usage


Cet article aurait pu s’achever sur une conclusion fracassante de bon sens : « finalement ce n’est pas compliqué, le réutilisable est meilleur que le jetable ! ». A matériau identique, ceci est généralement vrai[3].

Cependant, il peut aussi exister d’autres façons de repenser l’usage, qui font rimer « unique » et « écologique ». Par exemple, la start-up Koovee propose des couverts intégralement comestibles : l’habituelle cuillère en plastique jetable des buffets, dont 4,7 milliards sont utilisées chaque année en France, devient alors un biscuit salé à déguster en même temps que le contenu de la verrine.


Où est l’intérêt ?

  • Si cette cuillère ne faisait que remplacer une cuillère en plastique, l’intérêt serait faible : autant utiliser une cuillère classique en métal ;
  • Mais dans la mesure où la cuillère Koovee est comestible, elle remplace à la fois la cuillère en plastique ET le pain / le gressin / le toast qui accompagne traditionnellement le buffet. Dans ce cas précis, l’usage est alors nouveau, et intéressant d’un point de vue environnemental.


Conclusion :
tant que l’usage des emballages et de la vaisselle ne changera pas, les solutions proposées par la restauration rapide et la livraison à domicile resteront au mieux des améliorations à la marge (cas des emballages en carton à condition qu’ils soient recyclés), au pire des solutions contreproductives, pires d’un point de vue environnemental et même sources de greenwashing (cas des bioplastiques) ! La solution de facilité reste de jeter sa vaisselle et ses emballages : charge à chacun de les réutiliser… ou d’inventer de nouveaux usages.

[1] ADEME (2013), Le gisement des emballages ménagers en France – Evolution 1994-2012

[2] Des études récentes ont même prouvé qu’un bioplastique censé être biodégradable n’était pas souvent biodégradable dans des conditions naturelles : un compostage domestique ne suffit pas pour le biodégrader, il faut recourir à un compostage industriel… Voir en particulier cette étude de l’Université de Plymouth : https://www.plymouth.ac.uk/news/biodegradable-bags-can-hold-a-full-load-of-shopping-three-years-after-being-discarded-in-the-environment.

[3] La comparaison de deux matériaux différents peut être très favorable au plastique, comme le montre l’exemple du tote bag en coton, qui devient meilleur que le sac en plastique à usage unique à partir de 7 000 réutilisations… autant dire jamais 😉 A matériau identique en revanche, le réutilisable est en général meilleur que l’usage unique, même si chaque analyse de cycle de vie retient ses propres hypothèses concernant notamment : le nombre d’utilisations et l’efficacité du lavage du produit réutilisable d’une part, le recyclage du produit jetable d’autre part, et dans les deux cas des distances de transport parfois significativement différentes d’un scénario à l’autre.

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