Loi Climat et Résilience : quelles avancées sur les déchets ?

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Loi Climat et Résilience : quelles avancées sur les déchets ?

Issue des travaux de la Convention citoyenne pour le Climat, la loi Climat et résilience a été promulguée le 22 août 2021.

Elle a pour ambition de construire une société neutre en carbone, plus résiliente, plus juste et plus solidaire, en entraînant et accompagnant l’ensemble des acteurs dans cette transformation. Elle vient compléter la loi agriculture et alimentation, la loi énergie climat, la loi d’orientation des mobilités, la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC), ainsi que le plan de relance qui consacre 30 milliards d’euros à la transition écologique.

L’ensemble de ces mesures devrait permettre à la France de tendre vers l’objectif de 40% de réduction des gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 1990.

Qu’y a-t-il de plus dans la loi Climat et résilience ? Nous vous proposons notre analyse.

 

Principales dispositions concernant les déchets

  • Article 20 – Interdiction de la publicité aérotractée

Les avions publicitaires seront interdits à compter du 1er octobre 2022.

Cette mesure est nécessaire au vu du caractère polluant de ce type de publicité et du danger qu’elle peut représenter (les accidents ne sont pas rares).

  • Article 21 – Expérimentation du « Oui pub »

Le « Oui pub » sera testé dans certaines collectivités pour tenter de réduire les prospectus non désirés dans les boîtes aux lettres. L’objectif est d’évaluer les conséquences du passage d’une logique de « stop pub » où les ménages doivent indiquer qu’ils ne souhaitent pas recevoir d’imprimés publicitaires, à une logique de « oui pub » où seuls les ménages qui le demandent reçoivent ces imprimés.

Cette solution devrait s’avérer efficace pour lutter contre le gaspillage massif de papier : en 2018, près d’un million de tonnes de courriers non adressés, de catalogues et brochures commerciales ont été déposés dans les boîtes aux lettres des Français. Cela correspond à environ 30 kg/an d’imprimés publicitaires par foyer, et 2,8% de la quantité totale de déchets des ménages.[1]

  • Article 23 – Vente en vrac dans les grandes surfaces

D’ici le 1er janvier 2030, les commerces de détail de plus de 400m2 devront réserver au moins 20% de leur surface à la vente de produits en vrac, ou tout autre dispositif équivalent. En parallèle, une expérimentation sera menée pour les commerces de plus petite taille.

Bien que la vente en vrac soit très tendance, elle représente actuellement moins de 3% des produits vendus en grande et moyenne surface en France.[2] D’ici 10 ans, les supermarchés vont donc devoir s’organiser pour augmenter fortement ces chiffres. Une mesure ambitieuse, qui devrait ravir les consommateurs sensibles à cette démarche.

  • Article 23 – Interdiction des emballages en polystyrène non recyclables

A partir du 1er janvier 2025, les emballages en polystyrène non recyclables et dans l’incapacité d’intégrer une filière de recyclage seront interdits.

Les pots en polystyrène étant actuellement peu recyclés, il faudra s’y atteler ou bien changer de matériau. C’est peut-être l’occasion de créer une filière nationale pour le recyclage des polystyrènes. Des efforts avaient déjà été entamés en ce sens, notamment avec la publication du Décret 3R qui fixait déjà un objectif de 100% de plastiques recyclables d’ici 2025.

  • Article 24 – Recyclage ou réemploi des contenants pour la vente à emporter en restauration collective

Dès le 1er janvier 2025, les établissements offrant des services de vente à emporter devront proposer à leurs consommateurs d’être servis dans un contenant réutilisable ou composé de matières recyclables.

L’interdiction de la vaisselle en plastique à usage unique s’est progressivement étendue au profit de la vaisselle réemployable ou recyclable : avec la loi EGalim pour la restauration scolaire, la loi AGEC pour la restauration rapide « sur place » et désormais la loi Climat et résilience pour la restauration collective « à emporter ».

  • Article 25 – Observatoire du réemploi et de la réutilisation

La loi AGEC prévoyait la création d’un observatoire du réemploi et de la réutilisation avant le 1er janvier 2021. Cette date butoir est finalement repoussée à février 2022, les délais n’ayant pas été respectés.

Cet observatoire sera chargé de collecter et diffuser des informations à propos du réemploi et de la réutilisation des produits appartenant à une filière REP.

  • Article 28 – REP sur les emballages des professionnels de la restauration

La filière à responsabilité élargie pour les producteurs d’emballages servant à commercialiser les produits consommés ou utilisés par les professionnels de la restauration devait être mise en place avant le 1er janvier 2021.

Le texte repousse l’échéance prévue par la loi AGEC – et qui n’a pas pu être respectée en raison du Covid – au 1er janvier 2023.

  • Article 29 – Eco-organismes chargés des emballages

Les éco-organismes chargés des emballages ménagers et non ménagers doivent consacrer 5% du montant annuel des cotisations qu’ils perçoivent au développement de solutions de réemploi et de réutilisation des emballages.

Précédemment, les éco-organismes devaient y consacrer seulement 2% du montant annuel des cotisations. C’est donc une belle augmentation.

  • Article 30 – Disponibilité des pièces détachées

L’article reprend l’obligation faite aux fabricants et importateurs d’assurer la disponibilité des pièces détachées pendant au moins cinq ans après la fin de la commercialisation des articles, en élargissant la liste des produits concernés.

Cette mesure figurait déjà dans la loi AGEC pour les équipements électroménagers, les petits équipements informatiques et de télécommunication, les écrans et moniteurs ainsi que le matériel médical. Or, la loi AGEC prévoit la création de nouvelles filières REP pour les outils de bricolage et jardin motorisés ainsi que les articles de sport et de loisir. Désormais, ces derniers feront donc partie des produits concernés et les fabricants ne se pliant pas à cette obligation seront sanctionnés.

  • Article 32 – Reprise des véhicules automobiles par les producteurs

Pour favoriser la réutilisation des pièces détachées, les producteurs de véhicules automobiles ou leur éco-organisme sont tenus de reprendre sans frais les véhicules en fin de vie auprès des particuliers.

Or, la gestion des véhicules hors d’usage (VHU) est déjà encadrée par la directive européenne 2000/53/CE[3] : les détenteurs de VHU doivent pouvoir les remettre sans frais aux installations de traitement, et les éventuels frais de transfert doivent être pris en charge par les producteurs. Dans la pratique, ce sont même les centres qui paient les détenteurs pour reprendre leur VHU. Cette mesure n’est donc pas révolutionnaire.

 

Quelles sont les perspectives ?


Barbara Pompili doit maintenant s’attaquer à un nouveau chantier : rendre la loi opérationnelle. Plus de 100 décrets d’application restent à écrire et à publier, en commençant par les mesures ayant le plus fort impact sur la vie des Français. Vaste programme ! Il reste à savoir quelles seront ces priorités, et si tous les décrets seront effectivement publiés. Pour l’heure, le calendrier de mise en œuvre est bien léger : seules quelques dates butoir ont été fixées.

De plus, quand bien même ces décrets viendraient à être publiés, leur application effective n’est pas garantie. Des contrôles vont-ils être mis en place pour s’assurer du respect de la loi ? Rien n’est moins sûr. Prenons l’exemple du décret « 5 flux », publié en mars 2016. En janvier 2019, constatant que le décret n’avait pas été respecté, Brune Poirson a convoqué les principales enseignes de restauration rapide qui se sont engagées à mettre en place le tri des 5 flux avant fin 2021. Or, l’échéance approche et de nombreuses enseignes n’ont toujours pas respecté le décret.

On peut également reprocher à la loi Climat et résilience – tout comme à la loi AGEC par ailleurs – de ne comporter qu’une série de mesures très précises ayant un impact limité. La loi manque de hauteur et se concentre sur des détails au lieu de prendre des mesures fortes qui traiteraient le problème à la source (en limitant la consommation), et donc la production de déchets.

Malgré tout, la France reste pionnière en matière de prévention et de gestion des déchets. Par conséquent, tout n’est pas à jeter, mais on aimerait aller encore plus loin. Les prochaines étapes vont être décisives.

Vous avez besoin de plus de conseils sur la gestion de vos déchets ?

[1] Source : Dossier de presse « Loi Climat et Résilience », Août 2021

[2] Source : « Le marché du vrac dépasse le milliard d’euros, en très forte croissance », Terre-net, Février 2020

[3] Source : Directive 2000/53/CE relative aux véhicules hors d’usage

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